Que devient NIAGARA ?
Formé en 1982, NIAGARA est issu de la vague du rock rennais du tout début des années 80. Composé dans un premier temps de Muriel MORENO, Daniel CHENEVEZ et José TAMARIN, la formation s’appelle d’abord L’OMBRE JAUNE, avant de rencontrer un succès considérable en radios dès 1986 en duo (Muriel et Daniel) sous le pseudo de NIAGARA, grâce au tube « Tchiki boum » (Top 13 en 1986). José quitte ce dernier avant la sortie du premier album « Encore un dernier baiser » – qui donnera lieu aux tubes suivants : « L’amour à la plage » (Top 5 en 1986), « Je dois m’en aller » (Top 13 en 1987) et « Quand la ville dort » (Top 7 en 1987). En 1988 sort le second opus « Quel enfer !« , avec le tube « Soleil d’hiver » (Top 12 en 1988) et dans une moindre mesure « Assez ! » (Top 32 en 1988), « Flammes de l’enfer » (Top 35 en 1989) et « Baby Louis« .
Le duo construit son image grâce à ses clips, réalisés par Daniel CHENEVEZ, qui s’occupe également des arrangements et de la production des disques. Muriel MORENO développe un personnage sexy, qui évoque l’héroïne de bande dessinée BARBARELLA. « Je ne me suis pas toujours reconnue dans les clips de Daniel. Il avait un parti pris sur moi qui était artistique mais qui ne me correspondait pas » déclare-t-elle pour autant sur MCM. NIAGARA, qui est d’abord perçu comme un groupe pop aux paroles insouciantes (les premiers singles sont influencés par la musique afro-cubaine que Muriel et Daniel écoutent à l’époque), adopte ensuite un style plus rock, et aborde des sujets plus graves sur des titres comme « J’ai vu » (Top 32 en 1990) ou « Pendant que les champs brûlent » (Top 45 en 1990), sur le troisième album « Religion« .
En 1991, NIAGARA tourne en Europe, et se produit au Zénith de Paris ; il attire notamment 15 000 personnes dans un stade moscovite. Son dernier album « La vérité« , sort en 1992. Mais dès lors, le succès est moindre, et c’est la chute de NIAGARA. Muriel MORENO et Daniel CHENEVEZ se séparent ; ils poursuivent leur carrière en solo, l’une avec son unique opus de chansons « Toute seule » en 1996, et l’autre avec l’opus « Excentrique » en 1997 (puis « Hypnose » deux ans plus tard). Sans succès. En 2002 pour autant, NIAGARA reçoit un nouveau disque d’or pour « Flammes« , un Best of comprenant dix-huit titres remastérisés, qui se vend à plus de 100 000 exemplaires en deux mois (réédité en 2016 sous la forme d’un double vinyle, il atteint depuis les 350 000 passages en caisse).
Leur popularité est inentamée et le duo devient culte. NIAGARA demeure un vestige intact. Aucun concert de reformation, aucune tournée d’anciennes gloires des années 80 ou 90. L’image est restée telle quelle, sans être abîmée. Selon Frédéric RAT, fan inconditionnel : « NIAGARA n’a pas été galvaudé, n’a jamais été remixé ou étiré dans 36 000 Best of. Et malgré cette absence, le groupe est extrêmement repris par la jeune génération (ndlr : TONYA LOREN, BRIGITTE, IZIA, FEU ! CHATTERTON, LESCOP, Flavien BERGER, MANSFIELD.TYA, Guilhem VALAYÉ, BENSÉ, PENDENTIF, LA MÉCANIQUE…), on ne compte plus les versions différentes de certains tubes de NIAGARA. Preuve qu’au-delà de l’image, l’héritage culturel et musical du duo existe » déclare-t-il à nos confrères du site Gonzaï. Mais ses deux membres sont déjà loin de tout ça.
Depuis quelques années, Muriel MORENO ne chante plus, et s’est reconvertie, entre deux albums instrumentaux, DJ au féminin, de ces filles qui sillonnent la planète leur sac de disques sur l’épaule, voguant de soirées select en clubs plus ou moins privés. « La voix me paraît désormais un élément trop concret dans la musique » explique-t-elle dans l’émission « Vie publique, vie privée » sur France 3. « J’ai fait fi de cet instrument-là pour me concentrer sur les compositions et transposer des éléments très sombres sur des formes toniques. C’est sûr que ma musique s’adresse désormais à un public d’initiés. En même temps, ce que je perds en auditeurs en France, je le gagne en Europe. Trop longtemps, j’étais condamnée à plaire. Pour moi, faire de la musique, c’est surtout apprendre à devenir une personne meilleure, plus digne« .
ET AUJOURD’HUI ?
Muriel MORENO est retournée dans l’ombre. L’artiste crée toujours entre photographie et réalisation, mais loin des strass et des paillettes d’antan. Depuis 2010, elle a par ailleurs cessé son activité de DJ pour se lancer dans le fitness et les sports « doux« . Elle a suivi une formation à l’institut des métiers de la forme pour devenir prof de yoga et de pilates. Depuis 2014, elle exerce dans plusieurs clubs de Paris et de sa région, en redevenant tout simplement Muriel LAPORTE. « Il n’y a plus aucune corrélation avec NIAGARA… aucun fil rouge si ce n’est celui qui me lie à ma jeunesse. C’est pour cette raison qu’aujourd’hui je me sens plus en phase avec l’adolescente que j’étais qu’avec la chanteuse de NIAGARA. Je suis très bien avec les courants alternatifs, l’instrumental, le fait d’être dans l’ombre… Pour moi, le triomphe est très douloureux » précise-t-elle.
En 2014, Daniel CHENEVEZ dévoilait enfin le successeur de la galette « Hypnose« , paru en 1999. L’EP digital « Erotisme, Cantique 25.7 » contient 6 titres, mixés par Dominique BLANC-FRANCART (le papa de SINCLAIR) ; le premier extrait « Sans raison aucune » a été clippé par le chanteur – inspiré par le noir et blanc d’ANTONIONI période « L’Avventura« . Depuis, et sans aucun emballement médiatique, plus aucune trace de lui sur les réseaux sociaux.
Thierry Cadet