Discorama : histoire d'une émission portée par Denise Glaser
Discorama est une émission qui a fait date à la télévision française. Une référence pour de nombreux présentateurs, un lieu de rendez-vous incontournable pour les artistes, l’émission doit toute sa force à sa créatrice, Denise Glaser.
Débuts à la RTF
Denise Glaser débute à la RTF en 1954, où elle est embauchée en tant qu’illustratrice sonore. Elle travaille notamment aux côtés de Pierre Sabbagh et s’occupe de l’habillage musical du journal télévisé. Cependant, Denise Glaser a une autre idée en tête : produire sa propre émission dans laquelle elle pourrait discuter de cinéma, de musique et de théâtre avec les artistes. Elle présente son projet à Jean D’Arcy, le patron de la RTF, mais essuie plusieurs refus. Ce n’est qu’après de nombreuses tentatives, en 1959, que le patron accepte finalement de diffuser son émission. Le 4 février 1959, l’émission fait ses débuts à l’antenne, et dans un premier temps, c’est le comédien Jean Desailly qui en assure la présentation.
Succès et polémiques
L’émission s’impose très vite dans le paysage télévisuel français. Discorama a pour particularité de prendre le temps de discuter avec les artistes, ils ne font pas que chanter leurs derniers disques. D’autant plus que, dès 1963, Denise Glaser en devient la présentatrice exclusive. Elle est réputée pour ses entretiens en tête-à-tête, dans un décor dépouillé. Cette approche donne lieu à des moments de silence, favorisant la liberté de parole et de ton, permettant ainsi aux artistes de se livrer pleinement. Le créneau de diffusion, tous les dimanches à 12h, offre à l’émission une très belle exposition.
Mais seulement quelques mois après avoir pris les rênes de l’émission, Denise Glaser se retrouve au cœur d’une polémique. Jean Ferrat est invité dans l’émission du 26 janvier 1964 pour interpréter ses dernières chansons. Parmi elles figure « Nuit et Brouillard« , malgré son interdiction à la radio et à la télévision. Cette chanson évoque la déportation nazie vers les camps de la mort pendant la Seconde Guerre mondiale. À l’époque, l’heure était à la réconciliation avec l’Allemagne, et Robert Bordaz, le directeur de la RTF, la jugea « inopportune ». Malgré cela, Denise Glaser décide de passer outre et présente la chanson. En conséquence, elle est licenciée. Cette décision provoque une réprobation unanime de la part des artistes, et même du ministre de l’information Alain Peyrefitte. Finalement, c’est le ministre lui-même qui ordonne à Robert Bordaz de réintégrer Denise Glaser et de rétablir son émission.
Déclin et arrêt de l’émission
Denise Glaser a toujours été ouvertement de gauche. Cela n’a pas posé de problèmes particuliers jusqu’aux événements de mai 68. Elle prend alors part aux grèves qui paralysent l’ORTF et manifeste contre le pouvoir direct du gouvernement sur l’audiovisuel public. La présentatrice se voit donc privée d’antenne à plusieurs reprises et à nouveau licenciée cette même année. Elle est finalement réengagée quelques mois plus tard mais Discorama est déplacé de la case hebdomadaire du dimanche midi pour une émission mensuelle le vendredi en deuxième partie de soirée. Les audiences vont naturellement diminuer avec le temps mais Denise Glaser tient bon.
L’éclatement de l’ORTF en 1975 aura définitivement raison de l’émission. Les désaccords politiques entre Denise Glaser et le nouveau président de la République, Valéry Giscard d’Estaing, feront disparaître intégralement la présentatrice du paysage audiovisuel. La dernière de l’émission a lieu le 5 janvier 1975 soit la veille de la création de TF1.
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