Herbert LÉONARD : "Eddy MITCHELL n'est pas le type le plus abordable"
Herbert LÉONARD, dont le nouvel album « Mise à jour » est disponible, revient pour Frédéric ZEITOUN dans « Melody de ma vie » sur les artistes qui lui ont donné envie de faire ce métier. THE SHADOWS, Otis REDDING ou Marvin GAYE en font partie, mais aussi Eddy MITCHELL (période LES CHAUSSETTES NOIRES), alors que l’interprète de « Puissance et gloire » fait encore partie du groupe LES JETS.
« Avec LES JETS, on est allés voir LES CHAUSSETTES NOIRES à Strasbourg en 1961 ou 1962, et on était subjugué par le fait qu’il y avait un chanteur, et quel chanteur ! Eddy MITCHELL c’était un ovni déjà à l’époque. Et on s’est dit : « maintenant il nous faut absolument qu’on ait un chanteur ». « Tu parles trop » c’était la chanson qui nous avait le plus frappé. On a trouvé un chanteur, et on est vraiment devenu les rois de Strasbourg. Donc LES CHAUSSETTES NOIRES c’était un grand tournant dans ma vie musicale. Je n’ai jamais assez bien rencontré Eddy MITCHELL pour pouvoir lui en parler, et puis je trouve que MITCHELL n’est peut être pas le type le plus abordable du monde… je dis ça par timidité .../… C’est Otis REDDING qui m’a donné envie de chanter. J’ai fait deux mois de tournée avec LES LIONCEAUX, on était en lever de rideau de la tournée de Chuck BERRY. Malgré le fait qu’on ait passé deux mois de tournée avec lui, on ne l’a pratiquement jamais vu …/… C’était quelqu’un de bizarre, qui n’était pas très chaleureux. J’avoue que c’était une de mes idoles, mais que j’ai été un peu déçu. Dans cette tournée y’a avait Ronnie BIRD, qui était cent-cinquante fois mieux que Chuck BERRY je trouve… Et je lui rend hommage à Ronnie, je sais qu’il est à New York depuis des années et des années, mais j’aimerai bien le revoir …/… En ce qui me concerne, j’ai toujours eu le plus profond respect pour le public, mais j’ai toujours eu cette réputation d’être un peu froid et distant, probablement parce que je suis un sale con d’alsacien (rires). J’étais extrêmement timide, et d’ailleurs au début dans le milieu on m’appelait le Buster KEATON de la chanson parce que je ne souriais jamais« .
Le disque « Mise à jour » célèbre les 50 ans de carrière d’Herbert LÉONARD. Il comprend une sélection de ses tubes, et de chansons d’autres chanteurs ou chanteuses qu’il s’est fait un plaisir d’interpréter à sa manière, sans oublier des duos avec des artistes qu’il apprécie – dont « Ces instants magiques » avec Corinne HERMÈS. « Il y a des chansons là-dessus que j’aurais voulu qu’on m’offre à l’époque, et qu’on a offert à d’autres. Je les ai reprises, parce que c’est mon plaisir de les reprendre …/… Il y a une chose qui est sûre, c’est que je suis plus près de la fin que du début. Je suis là depuis cinquante ans, c’est le moment, maintenant, d’enregistrer des choses que je n’aurais pas pu enregistrer avant …/… « Traces de toi » par exemple, Alain CHAMFORT a sorti cette chanson pratiquement à la même période où j’ai commencé à avoir des envies de chanter des chansons d’amour plus physiques, que morales ou intellectuelles. Et cette chanson-là, franchement, j’aurais voulu qu’on me la donne, à moi ! C’était pas une chanson de Julien LEPERS, donc j’aurais pas pu l’enregistrer de toutes manières, puisque Julien avait une forme d’exclusivité, mais c’est une chanson qui m’a frappée. Je trouve que cette chanson est absolument parfaite, y compris avec CHAMFORT dessus. Parce que CHAMFORT a une voix chaude, de crooner, avec des intonations vocales toute à fait appropriées pour le texte qu’il est en train de chanter …/… Je pense que cette chanson devrait être encore beaucoup mieux considérée« .
Dès 1967, Herbert LÉONARD sort un premier single solo qui passera inaperçu, et partira sur la tournée d’ANTOINE en tant que guitariste. Finalement le premier succès arrivera avec la reprise de « Somebody To Love » des JEFFERSON AIRPLANE, qu’il écoulera à 70 000 exemplaires. En 1968, il dévoile un nouvel album et signe alors un nouveau succès avec le titre « Quelque chose tient mon cœur« , qui lui permet l’année suivant d’assurer les premières parties de Sylvie VARTAN, et surtout de travailler avec Lee HALLYDAY ou… Gérard MANSET. « En ce qui concerne Lee HALLYDAY, s’il m’a mis entre les mains de Gérard MANSET, c’est parce que je pense qu’au niveau de la maison de disques, on a dû lui dire : « maintenant il faut choisir entre Johnny et Herbert ». Alors il a choisi Johnny, ce qui me paraît tout à fait logique. Y’en a qui vont trouver que c’est de la ventardise de ma part, mais je sais très bien de quoi je parle (sourire). Parfois, on me donnait des chansons que Johnny avait refusées, pas ouvertement, mais le recul du temps on peut se dire ça. Par exemple « Pour être sincère« , mon deuxième gros tube, je pense que Johnny a dû la refuser à Jean RENARD (ndlr : qui prépare une comédie musicale), ce qui me paraît tout à fait logique parce que je ne vois pas Johnny HALLYDAY chanter cette chanson-là« .
« Johnny m’a lâché » déclarait Herbert LÉONARD il y a encore deux ans (voir sur ce lien).
Thierry Cadet